Millia : Redessiner un artisanat innovant et ludique à Premiere Classe

Alors que l’industrie mondiale de la mode se réunissait à Paris pour la dernière édition de Premiere Classe, une nouvelle voix dans l’univers des accessoires a émergé : Millia. Fondée par Carmen Inez, la marque basée à Amsterdam propose une approche audacieuse et conceptuelle de la maroquinerie, s’inspirant des formes architecturales, de l’univers de la décoration intérieure et d’une palette de couleurs éclectique. Avec un engagement fort envers l’artisanat et la durabilité, la présence de Millia sous les tentes de Premiere Classe a captivé l’attention des acheteurs comme des créatifs.

Pendant l’événement, Carmen Inez nous a accordé un moment pour parler de son parcours, de la philosophie de sa marque et des défis comme des victoires qu’implique le lancement d’un nouveau label dans un paysage mode aussi concurrentiel.

La naissance de Millia : Une vision créative personnelle et intuitive


Millia est née du besoin personnel de Carmen de créer un sac alliant parfaitement fonctionnalité et design poussé. « J’ai toujours été une fille de la mode », confie-t-elle. « Je cherchais quelque chose qui n’existait pas encore, ce qui m’a poussée à le créer moi-même. »


Avec un parcours en études de décryptage des tendances et une carrière dans les relations publiques, sa transition vers la mode est tout sauf classique. « La mode m’a toujours passionnée, mais je ne m’y suis jamais lancée professionnellement jusqu’au jour où j’ai ressenti cette inspiration particulière pour le dessin », se souvient-elle. « Cela m’a menée vers les fournisseurs, les matières, puis la production — j’ai suivi tout le processus créatif en m’y investissant à fond. »


Créer une marque de A à Z n’a pourtant rien eu de simple. « C’est extrêmement difficile de se faire une place en tant que nouvelle marque », précise-t-elle. « Trouver les bons fournisseurs, réussir à ce que les usines te prennent au sérieux — c’est un vrai challenge. Mais j’ai persisté et j’ai fini par rencontrer les bonnes personnes et les bonnes entreprises pour donner vie à ma vision. »


La production de Millia repose sur la qualité et la responsabilité. « J’ai choisi de travailler avec un atelier à Ubrique, en Espagne. Beaucoup m’ont conseillé de produire en Chine ou en Inde, car c’est moins cher et plus pratique, mais je voulais garantir le meilleur savoir-faire et des conditions de travail éthiques sur toute la chaîne de production. Pour moi, c’est plus qu’une question de coût — c’est créer quelque chose qui dure et qui a une vraie valeur pour les gens qui vont porter nos pièces. »


L’équipe créative de Millia adopte une démarche presque architecturale dans la conception de ses accessoires. « J’ai étudié le trend-watching et j’ai remarqué le retour en force des années 70 et 80 dans la déco intérieure — notamment avec des éléments sculpturaux et ludiques », partage Carmen. « Le travail de Gustav Westman m’a beaucoup inspirée, notamment sa réinterprétation de pièces iconiques comme le miroir Ultrafragola. C’est ce qui m’a donné cette idée directrice : pourquoi ne pas amener ces influences dans la maroquinerie ? »

Chaque sac Millia est pensé comme une sculpture fonctionnelle. « L’idée était de créer quelque chose qui se tienne seul — au sens propre comme au sens esthétique », explique-t-elle. « Si tu le poses sur une table, il garde sa forme. Si tu le portes avec une tenue simple, il transforme et sublime le look. Pour moi, l’essentiel était que mes sacs deviennent la pièce maîtresse d’une silhouette. » 


L’empreinte de la marque réside dans sa palette de couleurs audacieuse mais raffinée. « J’ai lancé ma première collection avec quatre couleurs — violet, beige, vert et noir. Ensuite, j’ai ajouté le jaune beurre et le marron chocolat », raconte-t-elle. « J’adore les teintes éclectiques, mais je voulais aussi des tons neutres pour toucher un public plus large. »


Artisanat et durabilité : Le pari des pièces qui traversent le temps


La durabilité est une valeur fondamentale pour Millia, même si Carmen reste lucide sur les défis que cela représente pour une jeune marque. « Au départ, je voulais fonctionner uniquement en précommande, mais c’était trop compliqué vu notre taille au moment du lancement », avoue-t-elle. « Du coup, j’ai choisi de produire en petites quantités pour limiter les déchets et baser chaque nouvelle collection sur les données et retours collectés à la fin de chaque saison… »


Le choix des matériaux est aussi au cœur de l’approche de la marque. « J’utilise du cuir nappa de haute qualité, le même que celui utilisé par des fournisseurs de maisons comme Loewe ou Louis Vuitton », souligne-t-elle. « Pour moi, la durabilité, c’est aussi créer des pièces qui durent plus de cinq ou dix ans, et pas des objets jetables dictés par les tendances. » Chaque pièce est faite à la main, ce qui illustre une fois de plus l’engagement de la marque pour une mode responsable. « Cela prend plus de temps qu’une production de masse en Chine ou en Inde, mais je préfère la qualité à la rapidité », affirme Carmen.


Premiere Classe : Une expérience déterminante pour Millia


En exposant pour la première fois à Premiere Classe, Carmen a vu le salon comme une occasion en or de présenter sa marque à un marché international plus large. « J’ai postulé après avoir raté l’édition de janvier, puis j’ai refait un dossier avec deux nouveaux modèles et une proposition de collection pour l’édition de mars, et j’ai été sélectionnée », précise-t-elle. « Pour moi, c’était le bon moment d’aller au-delà des Pays-Bas et de découvrir l’énergie d’une capitale de la mode comme Paris. »


Paris s’est vite révélée être un terrain idéal. « Aux Pays-Bas, les consommateurs vont souvent vers les grandes marques de luxe déjà établies. Ils économisent pour du Prada ou du Gucci… » observe-t-elle. « Mais en France, il y a une vraie appréciation des pièces uniques et du design travaillé. L’accueil ici a été incroyable et très réfléchi. »

Au-delà de la visibilité, le salon lui a permis de créer des connexions précieuses. « J’ai rencontré des acheteurs incroyables, notamment de Le Printemps et Monnier », confie-t-elle. « Sur le plan créatif, j’ai aussi eu la chance d’échanger des idées inspirantes. Beaucoup partagent cet amour des structures, du mouvement et des designs forts dans leur façon d’aborder la création. »


L’avenir de Millia : Continuer à évoluer et affiner sa vision


Avec un lancement aussi prometteur à Premiere Classe, que réserve l’avenir pour Millia ? « Je veux continuer à évoluer, tout en restant intuitive dans mes choix créatifs », déclare Carmen. « Je me fie à mon instinct — toutes les grandes décisions que j’ai prises, comme produire en Espagne ou choisir les couleurs, viennent de là et m’ont toujours portée vers de bons résultats ! »


Carmen trouve son inspiration dans un paysage à la fois digital et ancré dans le réel. « TikTok, Pinterest, les voyages — tout ça nourrit mon processus créatif », détaille-t-elle. « J’absorbe en permanence ce qui se passe dans le design, l’art, la culture. C’est ma façon de capter ce qui m’entoure et de garder une approche de design à la fois personnelle et connectée aux tendances pour chaque collection. »


Et son client idéal ? « Au début, je créais pour moi. Mais j’ai vite réalisé que mes sacs plaisaient à un public très large — des jeunes à l’affût des tendances aux professionnels sensibles au design », précise-t-elle. « C’est pour ça que j’ai choisi d’offrir à la fois des coloris neutres et des teintes plus vives — cela me permet d’être plus inclusive et de toucher chaque personne qui pourra se reconnaître dans mon travail, aujourd’hui et dans les années à venir… »


Au final, la vision de Carmen pour Millia s’affine : « Je veux créer des pièces qui ne soient pas juste des sacs, mais de véritables objets de désir — des pièces ludiques, architecturales et faites pour durer. » Avec sa fusion unique de structure, de couleur et de durabilité, Millia semble bien partie pour marquer durablement l’industrie des accessoires et de la maroquinerie, bien au-delà des allées de Premiere Classe.

Yann Jobard Setzu

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